Les seniors, premières victimes des progrès bancaires

28/07/20 | Catégorie

Disparus, les chèques, presque évaporés, les virements papier. Si un secteur a surfé sur la révolution numérique, c’est bien celui des banques. Sécurité, rapidité, clarté pour le bon côté de l’évolution. Complexité, déshumanisation, difficulté pour quelqu’un qui n’a pas grandi avec les technologies de se couler dans le moule. Oui, d’un coup de pouce sur son smartphone, on peut avoir accès au solde de ses comptes et faire un virement. Mais que se passe-t-il quand on ne connaît plus ses codes d’accès, qu’on ne comprend pas ce que veut la machine ? Face à l’écran, un grand sentiment de solitude… Sans compter que cette sécurité des codes peut se retourner contre l’utilisateur s’il doit se faire aider, ou si quelqu’un veut profiter de sa crédulité.

Bref, face au progrès du secteur, le senior n’a pas toujours le choix de gérer ses relations bancaires à l’ancienne. De plus en plus, il est poussé vers des systèmes électroniques qu’il n’a pas nécessairement désirés. Les frais qui lui sont demandés pour des opérations classiques, manuelles,  sont de plus en plus pénalisants.

Payer en liquide est un droit

Et quoi de plus traditionnel que la bonne vieille coupure de 20 ou 50 euros pour payer ses achats ? La crise du covid-19 s’est invitée dans le dossier cette année. Pour des raisons sanitaires, la manipulation d’argent liquide a été fortement déconseillée : l’argent n’a pas d’odeur, le virus non plus. Pas question de le faire passer de la main à la main. Le paiement sans contact, par carte bancaire, est devenu le must. Mais certains commerces ont oublié un peu vite que payer en liquide reste un droit fondamental. L’Union luxembourgeoise des consommateurs (ULC) a dû monter au créneau au plus fort de la crise pour rappeler ce principe. Encourageant le paiement électronique, l’association note toutefois qu’il y a encore des consommateurs, notamment des personnes âgées et des personnes vulnérables, qui ne détiennent pas de carte de paiement ou de crédit.

Digitalisation et fin de proximité

En temps normal, l’ULC bataille déjà généreusement pour défendre les droits des consommateurs face aux banques. Les plus âgés ne sont pas les moins exposés aux évolutions de ces institutions. A nouveau, l’aspect « physique » et relationnel compte beaucoup. Quoi de plus pratique pour une personne âgée, qui a souvent besoin d’assistance, que d’aller faire ses opérations régulièrement au guichet du coin ? Mais un beau jour, pour cause de rationalisation, le guichet disparaît, et le client est laissé à lui-même, surtout s’il est privé de moyens de locomotion. On ne parle même plus de taxation abusive des opérations manuelles – parfois très réelle –… puisqu’elles deviennent de facto impossibles. Que peut faire le senior désormais, à part tenter de trouver de l’aide dans sa famille… s’il en a une ?

La digitalisation bancaire est, clairement, un facteur d’exclusion préoccupant pour les personnes âgées.

Toujours comparer les banques

Le credo qui veut que la concurrence soit le meilleur rempart pour assurer les meilleurs services aux citoyens a volé en éclat avec la mise en place des nouvelles technologies : on s’adapte ou on est largué. Mais toutes les banques n’assaisonnent pas le naufragé numérique à la même sauce. La Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) offre sur internet un comparatif des tarifs officiels des grandes banques. Mais, hélas, il affiche surtout les tarifs officiels des opérations prises séparément et ne compare pas les « packages » offerts par les établissements, souvent plus avantageux. Difficile, donc, de faire son tri. L’ULC aimerait voir un outil plus dynamique et transparent, et persiste à réclamer des tarifs moins élevés pour les opérations aux guichets : retraits, dépôts ou virements. L’association demande aussi la gratuité des opérations bancaires pour les personnes de plus de 65 ans, les personnes handicapées, les personnes dépendantes.

Services à domicile

Si certaines de ses consoeurs se montrent frileuses pour aborder le sujet, la Spuerkeess se défend d’abandonner les seniors à leur sort. « Pour certains clients qui ont depuis toujours transmis leurs ordres de virement à nos employés en agence ou qui n’ont jamais utilisé de carte bancaire, franchir le pas vers les outils bancaires digitaux peut constituer une source d’appréhension. Nos équipes en agence sont formées spécifiquement et se tiennent à disposition continue de nos clients pour les assister », explique Claude Hirtzig, Chef du département Banque des Particuliers et Professionnels. Et de citer la modernisation des agences, qui permet l’accès aux personnes à mobilité réduite, mais aussi la circulation d’une agence mobile fournissant les prestations bancaires de base dans plusieurs communes. « Nous assurons aussi la livraison de fonds au domicile des personnes âgées et vulnérables qui n’ont pas d’autres accès aux services bancaires, via notre service Cash@Home. Ce service est actuellement gratuit dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid19. Et nous garantissons la gratuité des opérations manuelles en agence et la gratuité du traitement des formulaires de virement TUP pour les clients âgés (nés avant 1946) ainsi que pour certains clients nécessitant une assistance spécifique ». La banque organise aussi régulièrement des présentations et formations pratiques « Internet Banking & méi » dans ses agences, souvent sur demande d’une commune ou d’un club de seniors.

Liens utiles : le comparateur de la CSSF et le site de l’Union Luxembourgeoise des consommateurs